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Compte-rendu

Bicarbonate : pas de miracle dans l’acidose sévère

Bicarbonate : pas de miracle dans l’acidose sévère

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Nabic, bicarbonates, acidose métabolique, insuffisance rénale aigüe

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Nabic, bicarbonates, acidose métabolique, insuffisance rénale aigüe

Mots-clés

Nabic, bicarbonates, acidose métabolique, insuffisance rénale aigüe

Sodium Bicarbonate for Severe Metabolic Acidemia and Acute Kidney Injury

B. Jung et al., JAMA, 29.10.2025

Introduction

L’acidose métabolique sévère au cours d’une insuffisance rénale aigüe (IRA) peut entraîner des troubles électrolytiques, des arythmies et une dysfonction cardiaque, augmentant la morbi-mortalité. L’intérêt du traitement par bicarbonate de sodium reste débattu, certaines études suggérant un bénéfice chez les patients avec IRA modérée à sévère. L’étude BICARICU-2 a évalué l’efficacité du bicarbonate dans cette population.

Méthode

Essai randomisé, contrôlé, multicentrique, mené dans 43 unités de soins intensifs en France entre octobre 2019 et décembre 2023. Critères d’inclusions : patient-es avec SOFA ≥ 4 ou hyperlactatémie ≥ 2 mmol/L dans les 48h suivant l’admission avec : pH ≤ 7.2, HCO3- ≤ 20 meQ/L, PaCO2 ≤ 45 mmHg et une IRA de stade 2 ou 3 selon KDIGO. Critères d’exclusion : acidose respiratoire, acidose métabolique d’autre origine, intoxications par acides exogènes ou dialyse déjà initiée. Les patients ont été randomisés en 2 groupes, 1 groupe traité par bicarbonates (administration intraveineuse NaBic 4.2% env. 125-250 ml en 30’ max 1L visant à atteindre un pH ≥ 7.3 pendant 28 jours) et 1 groupe contrôle (soins standards sans bicarbonate). Issue primaire : mortalité toutes causes à 90 jours. Issues secondaires : recours à la dialyse dans les 28 jours. Les indications de dialyse pour les 2 groupes comprenaient un œdème pulmonaire aigu réfractaire, une oligo-anurie, une hyperkaliémie réfractaire, ou un pH < 7.20 malgré réanimation adaptée.

Résultats

640 personnes incluses (âge moyen 67 ans), dont 54% en choc septique ; pH médian à l’inclusion de 7.15. La mortalité était de 62.1% dans le groupe bicarbonate et de 61.7% dans le groupe contrôle, soit une différence absolue de 0.4% non significative (p = 0.91). En revanche, le recours à la dialyse dans les 28 premiers jours était plus fréquent dans le groupe contrôle (50%) que dans le groupe traité par bicarbonates (35%).

Discussion

Le traitement par bicarbonate n’a pas réduit la mortalité à 90 jours, qui était très élevée dans les 2 groupes (> 60%). En revanche, il était associé à une diminution du recours à la dialyse à 28 jours par rapport au groupe contrôle, principalement en raison d’une moindre fréquence d’acidémie persistante (pH < 7.20) et d’hyperkaliémie. Les principales limites incluent l’absence d’aveuglement, le crossover entre groupes, une population exclusivement issue des soins intensifs et l’absence de suivi à long terme du recours à la dialyse. De plus, en moyenne, le groupe bicarbonate a reçu 950 ml de fluides supplémentaires par rapport au groupe contrôle à 48 h, ce qui a pu contribuer à la réduction du recours à la dialyse.

Conclusion

L’étude BICARICU-2, montre que chez les patients présentant une acidose métabolique sévère (pH ≤ 7.20) et une IRA modérée à sévère, l’administration intraveineuse de bicarbonate de sodium n’améliore pas la mortalité à 90 jours. Ces résultats renforcent l’idée de ne pas recourir systématiquement au traitement par bicarbonate, notamment en cas d’acidose métabolique légère.

Date de publication Auteurs
28.11.2025