Compte-rendu
Paracétamol, grossesse et troubles neurodéveloppementaux : 2,5 millions d'enfants pour y voir plus clair
Paracétamol, grossesse et troubles neurodéveloppementaux : 2,5 millions d'enfants pour y voir plus clair
Télécharger (PDF)paracétamol, sécurité, troubles neurodéveloppementaux, autisme
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Introduction
Le paracétamol est l'antalgique de prédilection pendant la grossesse. Mais voilà qu'une série d'études (et de discours présidentiels) vient semer le doute: et si ce médicament si rassurant augmentait le risque d'autisme, de trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ou de déficience intellectuelle chez l'enfant à naître ? Cette étude observationnelle de grande envergure vient apporter un éclairage bienvenu sur cette question anxiogène.
Méthode
Étude de cohorte nationale suédoise incluant 2'480’797 enfants nés entre 1995 et 2019, avec suivi jusqu'en 2021. L'exposition au paracétamol pendant la grossesse a été documentée via les registres anténataux et pharmaceutiques. Les issues primaires étaient les diagnostics d'autisme, de TDAH et de déficience intellectuelle selon les codes CIM-9 et CIM-10. Analyse contrôlée par fratrie (1'773’747 enfants), comparant les enfants exposés avec leurs frères et sœurs (mêmes parents biologiques) non exposés, neutralisant ainsi les potentiels facteurs de confusion génétiques et environnementaux familiaux.
Résultats
Au total, 7.5% des enfants ont été exposés au paracétamol pendant la grossesse. Dans les modèles d'analyse de population ajustés, on observait des associations modestes entre l'exposition au paracétamol et les troubles neurodéveloppementaux : hazard ratio (HR) 1.05 pour l'autisme, 1.07 pour le TDAH et 1.05 pour la déficience intellectuelle. Dans l'analyse contrôlée par fratrie, toutes les associations disparaissent complètement : HR 0.98 pour l'autisme, 0.98 pour le TDAH et 1.01 pour la déficience intellectuelle. Aucune relation dose-effet n'a été observée, même pour les doses élevées. A noter que l'aspirine montrait un effet protecteur dans l'analyse par fratrie, possiblement en raison de son utilisation ciblée pour prévenir la prééclampsie et ses complications (prématurité, retard de croissance), facteurs de risque connus de troubles neurodéveloppementaux.
Discussion
Les associations modestes observées dans les modèles conventionnels disparaissent lorsqu'on contrôle les facteurs familiaux. Ce n'est donc pas le paracétamol qui est en cause, mais plutôt les caractéristiques familiales qui prédisposent à la fois à l'utilisation d'analgésiques pendant la grossesse et aux troubles neurodéveloppementaux chez l'enfant. Toutefois, l'analyse par fratrie ne permet pas d'identifier précisément quels facteurs familiaux (génétiques, environnementaux, comportementaux) sont en cause. L’étude présente de solides atouts : une très large cohorte, un design contrôlé par fratrie, une mesure prospective de l’exposition et un suivi des enfants jusqu’à l’âge de 26 ans (capture des diagnostics à l'âge scolaire ou à l'adolescence). Comme limite principale, relevons que les données sur le moment précis (par trimestre) et la durée de l’exposition sont limitées, alors que certains effets neurodéveloppementaux pourraient être spécifiques à des fenêtres critiques.
Conclusion
Cette étude robuste ne trouve aucune preuve d'un effet causal du paracétamol pendant la grossesse sur le risque de troubles neurodéveloppementaux. Les associations précédemment rapportées reflètent des facteurs de confusion familiaux plutôt qu'un effet toxique du médicament. Le paracétamol reste l'antalgique de première intention pendant la grossesse et peut être utilisé selon les indications appropriées sans crainte excessive pour le développement neurologique de l'enfant.
| Date de publication | Auteurs |
|---|---|
| 28.11.2025 |
Compte-rendu
mia_review_198
Date de publication
28.11.2025
Mots clés
paracétamol, sécurité, troubles neurodéveloppementaux, autisme
CHUV MIAJOUR
La documentation de référence
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1011 Lausanne