Compte-rendu
Prendre ses antihypertenseurs le soir ou le matin ? l’importance de croiser les preuves
Prendre ses antihypertenseurs le soir ou le matin ? l’importance de croiser les preuves
Télécharger (PDF)antihypertensif; horaire; BedMed-Frail
Prendre ses antihypertenseurs le soir ou le matin ? l’importance de croiser les preuves
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Introduction
La question de l’heure optimale de prise des antihypertenseurs, pour améliorer le contrôle nocturne de la pression artérielle et réduire les événements cardiovasculaires (CV), reste controversée. Deux essais espagnols (MAPEC (2010) ; 2'156 participantes et Hygia (2020) ; 19'084 participantes), menés par la même équipe, avaient rapporté des bénéfices spectaculaires de la prise au coucher (45 à 60% de réduction de risque CV . L’ampleur de ces effets, obtenus sans modification du type ni de la dose des traitements, mais uniquement du moment de la prise, a rapidement suscité des doutes dans la communauté scientifique. Bien qu’aucune inconduite n’ait été démontrée, les experts ont recommandé de nouveaux essais randomisés avant d’intégrer ces résultats en pratique. BedMed-Frail a précisément cherché à clarifier ces données chez les patients âgés et fragiles.
Méthode
RCT multicentrique dans 13 établissements de réadaptation gériatrique/EMS au Canada entre 2020 et 2023. Participant·e·s réparti·e·s en deux groupes : le groupe intervention prenait tous les antihypertenseurs au coucher, tandis que le groupe contrôle continuait les soins habituels (85% prise le matin). L’issue principal composite était la survenue d’un premier événement parmi décès toutes causes, AVC, syndrome coronarien aigu ou insuffisance cardiaque nécessitant hospitalisation ou passage aux urgences. Les issues secondaires incluaient hospitalisations non planifiées, chutes, fractures, escarres, ou aggravation cognitive et comportementale.
Résultats
Au total, 776 résidentes hypertendues traitées (âge médian 88 ans, 72 % de femmes, 86 % avec troubles cognitifs), sous au moins un antihypertenseur quotidien, ont été incluses. Après un suivi médian de 1 an, 320 événements ont été enregistrés, dont 293 décès. L’incidence était de 29,4 événements pour 100 patients-années dans le groupe coucher contre 31,5 pour 100 patients-années dans le groupe contrôle (HR ajusté 0,88 ; IC95 % 0,71–1,11 ; p=0,28), sans différence significative. Aucune différence n’a été observée pour les chutes, fractures, escarres ou déclin cognitif/comportemental. En revanche, les hospitalisations non planifiées ou passages aux urgences étaient moins fréquents dans le groupe coucher (22,6 vs 30,0 événements/100 patients-années ; HR ajusté 0,74 ; IC95 % 0,57–0,96 ; p=0,02).
Discussion
L’essai BedMed-Frail, mené chez des patientes très âgées et fragiles, confirme les résultats du BedMed principal (3’357 patients de soins suivis 4,6 ans) ainsi que des essais britanniques TIME (21’104 patients suivis 5 ans) et HARMONY (103 patients in 12-week randomised crossover trial) : la prise des antihypertenseurs au coucher n’entraîne pas de réduction significative de la mortalité ni des événements CV majeurs, comparée à une prise le matin. Ces résultats contrastent fortement avec les essais espagnols MAPEC et Hygia . L’absence de bénéfice reproductible dans des populations et contextes différents montre combien il est essentiel de croiser les évidences, y compris entre essais randomisés contrôlés de grande envergure, avant toute traduction en pratique clinique.
Date de publication | Auteurs |
---|---|
26.08.2025 |
Compte-rendu
mia_review_183
Date de publication
26.08.2025
Mots clés
antihypertensif; horaire; BedMed-Frail
CHUV MIAJOUR
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1011 Lausanne