Compte-rendu
Utilisation de la ventilation non-invasive vs intubation chez les patients comateux sur intoxication
Utilisation de la ventilation non-invasive vs intubation chez les patients comateux sur intoxication
Télécharger (PDF)Ventilation non-invasive ; intubation oro-trachéale ; Intoxication ; Coma
Utilisation de la ventilation non-invasive vs intubation chez les patients comateux sur intoxication
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Introduction
Les patients présentant des troubles de l'état de conscience sont à risque de broncho-aspiration, ce qui peut entraîner de multiples complications, telles que pneumopathie, pneumonie, syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA), voire décès. Contrairement aux cas où l’état de conscience diminué est d'origine traumatique, et où un score de Glasgow (GCS) inférieur à <9 indique généralement la nécessité d’intubation, la décision d'intuber les personnes avec un état de conscience diminué d'origine toxique (alcool, drogues et/ou médicaments) est moins évidente. En effet, l'intubation elle-même comporte plusieurs risques, notamment l'instabilité hémodynamique, l'hypoxie, et peut favoriser les pneumonies (associées au ventilateur) ainsi que prolonger la durée de séjour à l’hôpital. Les études menées jusqu'à présent ont donné des résultats variés, soulignant ainsi l’intérêt de l'étude NICO (Non-invasive airway management of comatose poisoned emergency patients) pour évaluer les conséquences de l’évitement de l'intubation chez les patients intoxiqués présentant des troubles de l'état de conscience
Méthode
Etude prospective de phase 3, multicentrique (France) sur des patients en pré et intra-hospitalier, randomisés entre mai 2021 et avril 2023. Inclusion : patient·e·s majeur·e·s, suspicion clinique d'intoxication, GCS <9. Exclusion : Grossesse, prisonnier ou patient retenu contre sa volonté, patient·e avec critère d'intubation immédiat, suspicion d'intoxication aux traitements cardiotropes, intoxication à un seul toxique réversible (opiacé ou benzodiazépine). Intervention : randomisation en deux groupes (ratio 1:1) : approche conservative avec ventilation non-invasive sous surveillance rapprochée vs approche classique avec intubation orotrachéale selon choix du médecin. Issue primaire : issue composite de la mortalité intra-hospitalière, durée de séjour aux soins intensifs (maximum 28 jours) et durée de séjour hospitalier (maximum 28 jours). Issue secondaire : risque de pneumonie.
Résultats
N=237 avec caractéristiques similaires des 2 groupes lors de l’inclusion (GCS médian 6 ; âge médian 33). Principalement patients éthylisés (67%). Issue primaire de type « win-ratio » est en faveur du groupe intervention de manière significative avec 1.85 (IC 95%, 1.33-2.58 ; p< 0.001) avec une diminution du risque de complication (6% groupe intervention vs 14.7% groupe contrôle ; différence absolue de risque de 8.6%). Absence de décès dans les 2 groupes avec diminution du nombre d’admission aux soins intensifs (39.7% groupe intervention vs 66.1% groupe contrôle), diminution de la durée d’hospitalisation (21.5h vs 37h), diminution du recours à la ventilation mécanique (21% vs 65%) et diminution de la durée médiane de séjour aux soins intensifs (0h vs 24h). Concernant l’issue secondaire, notons une diminution du nombre de pneumonies dans le groupe intervention malgré un recours nettement moindre à l’intubation (6.9% vs 14.7% groupe intervention).
Discussion
Dans cette étude randomisée multicentrique, une stratégie visant à s’abstenir d’une intubation avec mise en place d’une ventilation non-invasive chez les patients avec troubles de l’état de conscience sur intoxication a significativement amélioré l’issue composite comprenant la mortalité intra-hospitalière, la durée de séjour aux soins intensifs et la durée de séjour hospitalier comparativement au groupe contrôle. Ces résultats sont limités par le manque d’aveugle, non réalisable.
Conclusion
Une approche conservatrice (ventilation non-invasive) des patients avec troubles de l’état de conscience et GCS <9 d’origine toxique, permet de diminuer de manière significative le nombre d’intubations non-essentielles, sans pour autant augmenter le nombre de complications liées à la broncho-aspiration. Cette approche peut donc avoir une application clinique immédiate notamment dans un service d’urgence ou en préhospitalier, mais également en cas d’intoxication médicamenteuse à l’étage sous réserve de l’absence de critère d’intubation en urgence. Ceci permet aussi de rappeler les limites du GCS, développé pour les patients présentant une altération de la conscience post-traumatique rendant son utilisation moins pertinente en dehors de ce contexte.
Date de publication | Auteurs |
---|---|
01.03.2024 |
Nicolas Fourré |
Compte-rendu
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Auteur
Nicolas Fourré
Date de publication
01.03.2024
Mots clés
Ventilation non-invasive ; intubation oro-trachéale ; Intoxication ; Coma
CHUV MIAJOUR
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